Propos sur la santé
par Louise Lamothe, infirmière à la retraite
Dans la mythologie grecque, Hygie était la déesse de la santé, de la propreté et de l’hygiène. Les Grecs voyaient en elle la gardienne de la santé de tous les êtres vivants. Elle proposait mystérieusement les bons aliments aux hommes et aux animaux de même que les remèdes qui convenaient à leurs maux. Elle personnifiait les forces de la vie, prévenait les maladies et pouvait atténuer la douleur. Symbole de la vigilance et de la prudence, un serpent lové sur son sein avançait la tête pour boire dans sa main. Sa sœur, Panacée, véritable reine de la médecine, incarnait la médecine curative. [Leur père, Esculape, fi ls d’Apollon, fut le dieu gréco-romain de la médecine à l’époque dite classique.
Un peu d’histoire
Surnommé le père de la médecine, Hippocrate vécut de 460 à 370 avant notre ère, dans l’île de Cos, en Grèce. Selon lui, l’organisme possédait le pouvoir de s’autoguérir grâce à sa force vitale; il fallait aider ce processus naturel par une bonne alimentation jointe à l’exercice physique. La santé, à ses yeux, représentait un équilibre fragile, une harmonie qui dépendait des humeurs : sang, fl egme, bile et eau, ainsi que des rapports entre l’âme et le corps. Dans l’Antiquité, les hommes avaient souci d’être bien portants.
Le Moyen Âge n’a pas été une période propice aux soins de santé; barbaries, famine, peste noire ont ravagé les populations.
À cette époque, vers le IXe siècle, est née la première faculté de médecine, l’école de Salerne, en Italie; on y enseigna la gynécologie et la chirurgie. Au quotidien, on mettait surtout l’accent sur l’alimentation, la tempérance, la propreté avec le lavage des mains et l’hygiène dentaire
De nos jours, il convient de parler d’un état incitant à se sentir bien dans son corps et son esprit. L’individu profite d’un plein d’énergie qui permet de vaquer à ses occupations quotidiennes et d’une pensée positive indissociable de relations humaines satisfaisantes. La plénitude de vivre, le sens de l’humour, la sérénité et la quiétude d’esprit sont souvent les qualités des personnes bien dans leur peau et jouissant d’un grand bien-être. Elles sont à l’abri des inquiétudes profondes; du moins, elles ont trouvé les moyens pour bien gérer leur stress et apprennent aussi à appliquer des solutions à certains problèmes de leur quotidien.
Une réalité socioculturelle
La santé devenue un phénomène socioculturel n’est plus l’apanage du corps médical. Dans les sociétés industrielles, les comportements sains sont de mise et, pour réduire les risques de maladie, la prévention s’avère primordiale. Tous les jours, on pose des gestes favorables ou néfastes à la santé. Celui qui décide de prendre un repas de mal bouffe devrait savoir qu’il consomme un excédent de sel, de sucre et de gras saturés, sans fibres alimentaires, le tout nuisible à son organisme; si cette manière de s’alimenter devient une habitude, il est certain qu’il dilapide son capital santé. Au contraire, si je m’off re une salade de saumon aux légumes, je pourrais en tirer de grands bienfaits grâce aux
vitamines, minéraux, bonnes protéines et acides gras Oméga-3.
Notre société de consommation a fait de la santé un bien à consommer et elle cultive avant tout l’insatisfaction des gens; pour que l’économie puisse continuer à fonctionner avec efficacité, il faut produire et consommer sans relâche.
Il en va de même de la santé. Jadis, seul le médecin s’occupait des malades. Aujourd’hui, une multitude de personnes offrent des services de santé : acupuncteur, naturopathe, thérapeute familial, psychopédagogue, conseiller en santé, thérapeute psychocorporel, ostéopathe, etc. La publicité aidant, nous consommons souvent la santé comme on consomme les articles de fêtes de fi n d’année. Pareille réalité exerce des pressions terribles sur le système de santé, dont les budgets croissent de manière exponentielle. Est-ce nécessaire et si bénéfique, au moindre besoin, de recourir à tous ces professionnels de la santé, y compris les médecins, et aux nombreux médicaments que vante l’industrie pharmaceutique ?
Un état de bien-être
Qu’est-ce donc que la santé? La première édition du Dictionnaire de l’Académie française, en 1694, la définit ainsi : Estat de celuy qui est sain, qui se porte bien. Pour sa part, le chirurgien et physiologiste français, le Dr René Leriche (1879-1955), estime que la santé, c’est la vie dans le silence des organes, une citation devenue fort célèbre. La définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), toujours reconnue et mondialement acceptée, spécifie que la santé est un état complet de bien-être physique, psychologique et social et non uniquement l’absence de maladie ou d’infirmité. L’absence de maladie ne suffi t donc pas, il faut penser à une harmonie globale entre les différentes composantes de l’être humain.
Dans son acception la plus large, l’état de bien-être rejoint les dimensions de la qualité de vie qui devient de plus en plus essentielle quand on vieillit.
L’OMS défi nit ainsi la qualité de vie : « Un concept très large influencé de manière complexe par la santé physique de l’individu, son état psychologique, ses relations sociales, son niveau d’autonomie ainsi que sa relation aux facteurs essentiels de son environnement. » Vision intégrative qui rappelle une vérité fondamentale en sciences de la santé : l’être humain est un tout indissociable, corps, esprit, environnement, et toutes les interventions en santé devraient tenir compte, dans une bonne mesure, du modèle biopsychosocial – prise en
compte des interrelations entre les aspects physique, psychologique et social de la maladie. On sait, en revanche, que le paradigme biomédical demeure dominant dans l’enseignement des facultés de médecine. Pourtant, la dimension biopsychosociale devrait être fortement reliée au raisonnement clinique et, plus largement, au mode de pensée de la médecine
L’être humain n’est pas seulement un ensemble de cellules, de tissus, d’organes et de systèmes : dans une perspective globale, il est corps et esprit vivant dans un milieu social.